top of page

La note d'intention

De voyages en voyages, de rencontres professionnelles en rencontres amicales cela fait longtemps maintenant que je m’intéresse et me questionne sur les fonctionnements de compagnies artistiques dans des pays qui ne bénéficient pas de soutiens politiques et financiers tels que ceux que nous avons en France.
Dans nombre de pays, l’économie et la résonance sociale et culturelle de projets artistiques ont un impact fondamental sur la vie des familles et des communautés que nous ne pouvons pas ou à peine soupçonner vue d’ici.


 

Mathieu Villard, jeune réalisateur sensible qui travaille au plus près des gens, à leur écoute et dont le travail d’image et de montage m’inspire, m’a mise au défi de réfléchir à l’écriture d’un documentaire sur ces questions. Un documentaire que nous avons décidé d’écrire à deux en complémentarité, en parfaite complicité.
Tant d’artistes rencontrés, tant de parcours inspirants croisés, par où commencer ? Sur qui, sur quoi écrire ? Une évidence : raconter l’histoire des Grandes Personnes de Boromo, leurs histoires.

La première fois que j’ai vu les Grandes Personnes de Boromo, j’étais alors une jeune étudiante qui passait ses étés à travailler pour pouvoir voyager et profiter de tous les festivals de musiques estivaux. C’est lors d’un de ces festivals qu’elles sont apparues. Je les ai tout de suite adorées, sans savoir qui elles-ils étaient, ce qu’ils-elles étaient, sans savoir leur nom, ni leur provenance, ni que nous nous retrouverions un jour.
Des marionnettes géantes et flamboyantes ont surgi, ou plutôt sont apparues, tel un mirage dans la poussière et la chaleur du festival. Hors du temps. Peu importe les concerts environnants, elles ont happé la foule, m’ont attrapée et nous ont réunis pour danser à leurs côtés le temps de ce présent. À leur disparition, des questions : que sont ces marionnettes, qui sont ces marionnettes, d’où viennent-elles ? C’était beau, les festivités ont continué.


 

Bien des années après, mon parcours personnel et professionnel me mène au pays des hommes intègres, le Burkina Faso, pour le festival International des arts de la rue « Rendez vous chez nous ».Dix ans après je travaillais avec ces marionnettes géantes croisées plus jeune, qui m’avaient tant enchantées, les Grandes Personnes de Boromo. Un autre festival, une autre chaleur, une autre poussière et le même émerveillement face à ces géants burkinabè fascinants et effrayants petits et grands.

 

Pendant quatre années je travaille ainsi à leurs côtés lors de ce festival au Burkina Faso ou encore à l’occasion de leurs venues en France. A chacune de leurs apparitions la même joie, le temps suspendu, l’apesanteur. Par le travail des amitiés aussi se sont créées. J’ai été invitée chez eux, à Boromo, dans leur lieu de création, leurs lieux de vie, et leur quotidien loin des tournées. Des amis, des collègues qui sont aussi chef de village, agriculteurs, artisans, commerçants...J’entrevois alors l’envers du décor. L’ambivalence de leurs vies, de leurs activités, l’importance des enjeux coutumiers, la complémentarité entre ces marionnettes géantes et les masques traditionnels, leur persévérance et obstination dans chacune de leurs actions.  

Aujourd’hui avec « En bonne compagnie – chez les Grandes Personnes de Boromo », envie de savoir, comprendre davantage leur vie et celle de la compagnie. Désireuse de mettre en lumière celles et ceux qui l’ont faite et qui la font. Curieuse de connaitre les effets sociaux d’un tel projet artistique là où personne ne s’y attendait. Envie et curieuse de découvrir les enjeux culturels qui se cachent derrière ces grandes et petites personnes, dans cette terre de Boromo, entre tradition et modernité.


La compagnie a eu 20 ans en 2019, tandis que le festival               « Rendez vous chez nous », fidèle partenaire, fêtait ses 10 ans.
L’occasion de retracer avec eux le chemin parcouru, d’imaginer les trajectoires à venir, de les voir en action (création, déambulations), d’interroger les habitants et surtout de s’immerger dans leur organisation et leur quotidien, d'autant plus dans le contexte sécuritaire que connait le Burkina Faso depuis 2015. Un documentaire qui, à l’image des marionnettes, entre force et fragilité, dévoilera des parcours, des réalités.

 


Elodie Dondaine

bottom of page